L'éclipse des mémoires

Les journées passèrent et Orhan sentit le malaise réveiller. Il n’était plus le seul à sembler affecté. Son apprenti continuait à se réchampir sans le moindre souvenir de ses intentions, et certaines personnes hôtes peuple qui passaient l'obscurité à l’auberge voisine mentionnaient de plus une concentration troublante dans leur sommeil. Le phénomène se répandait légèrement, notamment une onde invisible. L’idée d’une voyance gratuite sans attente lui traversa à présent l’esprit. Peut-être qu’un expert des arts religieux est en capacité de déloger ce glace. Pourtant, il hésitait encore, partagé entre la frayeur d’apprendre une axiome dérangeante et l'attraction qu’exerçait sur lui ce coffret. Il lui arrivait dès maintenant de le amarrer longtemps, s’égarant dans les icônes sculptés qui semblaient presque bouger sous son regard. Un matin, en réorganisant son étal, Orhan constata que le coffret avait changé de sa place. Il était sûr de l’avoir laissé sur l’étagère du fond, mais il se trouvait sur-le-champ au milieu de la table, tels que si quelqu’un l’avait déplacé du même pas l'obscurité. Pourtant, ni son apprenti ni lui-même ne se souvenaient l’avoir touché. Les nuits suivantes, Orhan décida de veiller. Il restait allongé sur son lit, les yeux mi-clos, guettant le moindre mouvement. Pourtant, l'apaisement finissait incomparablement par le saisir, et n'importe quel réveil était sous la même sentiment d’oubli efficient. Plus obscur encore, tout matin, il retrouvait le coffret à un endroit divers, tels que s’il possédait sa qui vous est personnelle volonté. L’idée que cet ballon soit un artefact secret ne faisait plus pas de doute. Peut-être était-il adapté à connaître quelque chose… ou à s’en alimenter. Mais quoi ? Les mémoires ? L’essence même des projets ? Orhan savait qu’il ne pouvait plus ignorer le risque. Il décida enfin de trouver une voyance gratuite pour voir ce qu’il avait en sa possession. Si cet objet volait les reves, alors peut-être détenait-il un contact plus funeste encore. Le vent chaud d’Istanbul soufflait par les volets entrouverts, mais une étrange froideur régnait dans la pièce. Le coffret semblait attendre.
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